N'est-il pas, en effet, de toute évidence, maintenant, que les parties sèches de
notre globe, que les plus vastes de ses continent, ont été autrefois recouverts
par la mer et enfoncés sous ses eaux, puisqu'elle y a laissé des traces si peu
équivoques de son séjour ?
N'est-il pas ensuite présumable que lorsque la mer recouvroit les parties ou
plusieurs des parties de notre globe qui sont maintenant à sec, celles ou
plusieurs de celles qui sont actuellement enfoncées et cachées sous ses eaux,
étoient alors saillantes et à nu, c'est-à-dire, qu'elles dominoient les eaux qui
devoient un jour les recouvrir?
En effet, dans les régions maintenant hors des eaux, en examinant la disposition
et la nature des couches superposées les unes au-dessus des autres, ne
retrouve-t-on pas des alternatives, quoique irrégulières, de couches terrestres,
c'est-à-dire, formées des débris des végétaux et des animaux terrestres, ainsi
que de ceux qu'ont laissés les eaux douces, et de couches véritablement marines
; or, comme je l'ai dit depuis long-temps dans certains de mes ouvrages, dans
mon Hydrogéologie surtout, ces alternatives de couches terrestres et marines ne
prouvent-elles pas, dans le même lieu, différens passages de la mer, interrompus
en différens temps, le sol ayant été tantôt à découvert, tantôt enfoncé sous les
eaux ?
Au lieu de ces catastrophes générales qui sont si commodes, parce qu'elles
dispensent d'étudier, dans le sujet dont il s'agit, la marche constante de la
nature, et qu'on a supposées pour tâcher d'expliquer l'importante considération
des débris de corps marins entassés et si abondans dans toutes les parties
sèches de notre globe ; quel est le naturaliste observateur qui n'aperçoit pas
au contraire les changemens, très-lents sans doute, mais continuels, qu'éprouve
la surface du globe que nous habitons ? Ne remarque-t-on pas effectivement que
la mer s'abaisse graduellement dans certaines contrées, et qu'elle y laisse des
terrains de plus en plus à découvert (comme dans les parties froides et
tempérées de l'hémisphère boréal) ; tandis qu'elle s'élève dans des contrées
opposées et y engloutit, quoique insensiblement, les pays encore à nu qui la
dominent ? Des catastrophes partielles ou locales, comme des éruptions
volcaniques, des tremblemens de terre, de grandes invasions d'eau dans les lieux
bas, ces eaux ayant miné et franchi les barrières qui les retenoient, sont
maintenant assez connues ; celles-ci suffisent à l'intelligence de beaucoup de
faits observés. Mais ces prétendues catastrophes générales du globe, sur quelles
bases les appuie-t-on ? Si nous obser- [observons]
|