difficile à saisir, ne seroit-elle pas un résultat de même nature ? Peut-il y
avoir là quelque chose qui soit réellement métaphysique ? On a tellement senti
que ce mot pouvoit être vide de sens pour nous, qu'on l'a appliqué, ainsi que je
l'ai dit, à exprimer nos raisonnemens, nos conséquences, nos principes, afin de
pouvoir y attacher des idées. Mais ces raisonnemens, ces conséquences, etc.,
sont encore des produits d'actes organiques ; ce qu'on n'avoit pas prévu : le
mot métaphysique doit donc être supprimé, comme n'exprimant rien dont nous
puissions avoir une connoissance positive.
Maintenant, je vais exposer ce qui me paroît possible, probable même, à l'égard
des moyens organiques que la nature a pu employer pour la formation des idées
complexes.
Si, à la suite d'un intérêt ou d'un besoin senti, le sentiment intérieur ému,
peut mettre en mouvement le fluide nerveux, le diriger sur les traits déjà
imprimés de l'idée qui est relative à cet intérêt, et rendre aussitôt cette idée
sensible ou présente à l'esprit de l'individu ; l'on conçoit que, par un autre
intérêt ou besoin, le sentiment intérieur également ému, peut diriger à la fois
le fluide nerveux sur les traits imprimés de plusieurs idées différentes,
relatives à cet autre intérêt, et les rendre simultanément présentes à l'esprit
ou à la pensée. Or, les traits de chacune de ces idées parvenant tous à se
réunir, à se faire ressentir dans un espace circonscrit, y formeront
nécessairement un ensemble de traits divers mélangés ; et cet ensemble, rendu
sensible à la pensée, y présentera un rapport, une conséquence, en un mot, une
idée complexe du premier degré. Cette nouvelle idée formera, pour l'individu, la
conséquence des différentes idées employées dans l'opération, et sera l'acte de
jugement que l'organe de l'intelligence a la faculté de faire.
Ainsi, l'acte de l'entendement qui donne lieu à la formation d'une idée
complexe, est toujours un jugement, lorsqu'il n'est point fantastique, comme
ceux que l'imagination a le pouvoir d'exécuter. Enfin, ce jugement n'est
lui-même qu'un rapport entre plusieurs idées réunies, qu'une idée
intellectuelle, résultant d'un ensemble qui a pour forme celle du mélange
d'idées qui le compose, ce mélange étant lui-même un objet physique. Cette
forme, sans contredit, est une image, mais qui devient d'autant plus obscure que
l'idée complexe qu'elle représente est d'un degré plus élevé.
Dans les idées complexes du premier degré, les idées primaires se font encore
ressentir ; et, par cette voie, les idées complexes dont il s'agit peuvent
facilement se fixer dans la mémoire. Mais quant à celles de degrés supérieurs,
ce n'est le plus souvent qu'à l'aide d'un prestige que nous nous les rappelons,
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