actes de l'intelligence ; et, en effet, dans tous ces actes, ce sont toujours
les idées qui sont le sujet ou les matériaux des opérations qui les
constituent.
Le second de ces principes avoit été reconnu par les anciens, et se trouve
parfaitement exprimé par cet axiome dont Locke ensuite nous a montré le
fondement ; savoir : qu'il n'y a rien dans l'entendement qui n'ait été
auparavant dans la sensation.
Il s'ensuit que toute idée doit se résoudre, en dernière analyse, en une
représentation sensible, c'est-à-dire, qu'on doit toujours en trouver la source
dans une sensation. On n'en connoît, effectivement, aucune qui ait une source
différente ; ce que je crois avoir prouvé dans ma Philosophie zoologique (vol.
2, pag. 411), où j'ai montré que l'imagination de l'homme, quoiqu'elle paroisse
en quelque sorte sans bornes, ne pouvoit créer une seule idée sans employer,
comme matériaux, quelques-unes de celles obtenues par la sensation, ou en
d'autres termes, sans modifier et transformer arbitrairement quelques-unes de
celles que les sens lui ont procurées. Voyez, dans l'Introduction de l'Histoire
nat. des animaux sans vertèbres (vol. 1, pag. 336) ce qui concerne le champ de
l'imagination ; et, dans ce Dictionnaire, voyez l'article IMAGINATION.
En effet, toute idée, soit simple, soit complexe, résulte d'une image tracée ou
imprimée dans l'organe de l'entendement. Dans l'idée simple, l'image imprimée
est celle de l'objet qui a fait la sensation remarquée ; et dans l'idée
complexe, l'image se trouve composée de la réunion de plusieurs autres qui y
sont toujours très-distinctes : en sorte que, dans toute idée quelconque, on
retrouve toujours les traits d'objets connus par la sensation.
Cependant on n'a pas encore généralement admis l'axiome cité ci-dessus ; car
plusieurs personnes observant des faits dont elles n'aperçurent point les
causes, pensèrent qu'il y avoit réellement des idées innées. Elles se
persuadèrent en trouver des preuves dans la considération de l'enfant qui, peu
d'instans après sa naissance, veut téter et semble chercher le sein de sa mère,
dont néanmoins il ne peut avoir connoissance par des idées nouvellement
acquises.
Sans doute, l'enfant dont il s'agit, ne connoît point encore le sein de sa mère,
n'en a nullement l'idée. Mais, ce qu'on ignoroit probablement, c'est qu'une
pareille idée ne lui est pas nécessaire pour donner lieu aux faits qu'on lui
voit alors produire. Son sentiment intérieur lui suffit ; et ce sentiment, qui
n'emploie jamais d'idées dans ses actes, est le propre de l'organisation de
l'individu, et ne s'acquiert point. Or, ce même sentiment, ému par le besoin,
lui fait faire machinalement des mouvemens divers, pour saisir avec la bouche ce
qu'il
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