peut rencontrer. II prend donc le sein de sa mère, dès qu'on le lui présente,
comme il prendroit celui de toute autre, ou tout autre corps ; et il le fait
sans l'emploi d'aucune idée, d'aucune pensée, mais uniquement par un acte de
l'instinct. Voyez ce mot. A l'égard des êtres intelligens, dans quelque degré
qu'ils soient dans le cas de l'être, l'instinct leur tient lieu de tout, dans
les premiers temps de la vie. Ce n'est que peu à peu qu'ils acquièrent des
idées, à mesure qu'ils donnent de l'attention aux sensations qu'ils éprouvent.
Ce n'est aussi que peu à peu qu'ils emploient leurs idées acquises, qu'ils
comparent les objets remarqués, et qu'ils s'exercent à juger ces objets. Aussi
leur jugement a-t-il d'autant plus de rectitude que l'exercice de cette faculté
est plus ancien pour eux.
Je reconnois donc, comme un principe fondamental, comme une vérité
incontestable, qu'il n'y a point d'idées innées ; que toute idée quelconque a
été acquise après les premiers actes de la vie, et qu'elle provient, soit
directement, soit indirectement, de sensations éprouvées et remarquées.
Avant de montrer comment il est probable que se forment les idées, et quelles
sont les conditions nécessaires à leur formation, je dois prévenir que tous les
actes d'intelligence, qui s'exécutent dans un individu, sont essentiellement le
produit de la réunion des causes suivantes ; savoir :
1° De la faculté de sentir ;
2° De la possession d'un organe particulier pour l'intelligence ;
3° Des relations qui ont lieu entre cet organe et le fluide nerveux qui s'y meut
diversement ;
4° Enfin, de ce que les résultats de ces relations se rapportent toujours au
foyer des pensées (à l'esprit), lequel communique avec celui des sensations, et
par suite au sentiment intérieur de l'individu.
Telle est la chaîne dont toutes les parties doivent être en harmonie pour que
les idées, ainsi que les opérations qui s'exécutent entre elles, puissent se
former ; telle est aussi la réunion des causes physiques essentielles à la
production du plus admirable des phénomènes de la nature.
Or, comme tous les phénomènes organiques qui constituent l'intelligence, ne sont
pour nous des merveilles que parce que nous n'en avons pas aperçu les causes
naturelles, ou que nous n'avons pu étudier à fond l'organe propre à leur
production ; que, cependant, tous ces phénomènes ont pour base des idées ; qu'à
leur égard il ne s'agit toujours que d'idées, que d'opérations qui s'exécutent
entre ces idées; j'ai dû, avant d'examiner ce que sont les idées elles-mêmes,
montrer
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