Dans l’article suivant, publié en juillet 1860, Pianciani traitait « de
l'origine des espèces organisées » et discutait en détail les thèses de Lamarck.
L'analyse des œuvres du naturaliste français et la critique des doctrines
transformistes faisaient montre d'une grande modération. Pianciani défendait
Lamarck de l’accusation de panthéisme et notait que
« ce naturaliste de valeur, mais qui n'était pas si bon philosophe, admet un
Dieu créateur, mais créateur de la seule matière primitive et de la nature,
laissant ensuite à celle-ci le soin de tout organiser et de produire les
plantes, les animaux et tous les corps » (28).
Le Jésuite reconnaissait qu'il ne fallait pas entendre le concept d'espèce au
sens rigide de ces naturalistes qui avaient tendance à considérer comme espèce
ce qui n'était que variété géographique ; et il citait l’exemple, indiqué par
Darwin dans son Journal de voyage, des variations locales particulières
qu'offrent la flore et la faune des Galapagos. Pianciani n'hésitait pas à
affirmer que Lamarck avait raison en soutenant que les espèces s'adaptent à des
circonstances nouvelles :
« Mais lorsqu'il affirme que de nouvelles parties destinées à de nouvelles
fonctions supplantent peu à peu celles qui ont disparu, alors, comme le fait
observer Lyell, il ne cite aucun fait positif à l’appui de la substitution de
quelques sens, faculté et organe tout à fait nouveau, à d'autres organes
supprimés » (29).
Pianciani résumait les arguments et les exemples de Lamarck destinés à démontrer
que l’usage et le non-usage des parties pouvaient produire des altérations
sensibles dans la morphologie du corps organisé. Une fois encore, le Jésuite
était disposé à admettre que le non-usage était peut-être responsable de la
cécité des animaux découverts dans les cavernes du Kentucky. Toutefois, il
s'empressait de souligner que l’on ne connaissait pas d'exemples d'organes
nouveaux produits par l’usage : le principe de l’usage et du non-usage était
donc apte à rendre compte de la façon dont un organe pouvait s'atrophier, ou
s'agrandir, mais ne réussissait pas à expliquer l’apparition d'un nouvel organe
dans une structure organique.
(28) Id., op. cit., n. 24, p. 166.
(29) Ibid., p. 172.
|