Pianciani discutait avec compétence diverses questions de géologie, de
paléontologie, d'anatomie comparée et de bio-géographie. Il connaissait de
première main la littérature naturaliste européenne et italienne et faisait
preuve d'une grande familiarité avec les œuvres de l’anatomiste anglais Richard
Owen, du conchyliologiste italien Giambattista Brocchi et des naturalistes
français Cuvier et de Blainville. Les articles parus dans la Civiltà cattolica
représentent l'ultime travail du vieux Jésuite. Pianciani mourut en 1862 et,
avec sa disparition, le débat italien sur l’œuvre de Darwin, qui s'amorçait avec
la publication de la conférence de De Filippi, fut privé d'un interlocuteur
catholique doué d'une vaste culture scientifique et remarquablement modéré.
Dès les premières années du XIXe siècle, des naturalistes et des intellectuels
italiens étaient au courant des diverses doctrines « évolutionnistes » discutées
par leurs collègues français, anglais et allemands. Conscients des difficultés
institutionnelles dont souffraient les sciences naturelles en Italie, les
naturalistes italiens effectuaient de fréquents voyages à Paris, en Angleterre
et dans les universités allemandes et autrichiennes, afin de visiter les grandes
collections d'animaux, de fossiles et de minéraux qui enrichissaient les
capitales européennes de nouveaux instruments de recherche en sciences
naturelles, Rares [sic] étaient les capitales italiennes dotées de musées
d'histoire naturelle en mesure de rivaliser avec les collections du Museum
parisien, ou du British Museum de Londres. La nécessité de se tourner vers
l’étranger ouvrait donc les sciences naturelles italiennes à des influences
variées : les idées de la Naturphilosophie se diffusèrent en Italie avant même
de circuler en France ou en Angleterre, et divers auteurs - tels que Gautieri,
Marmocchi et Foderà - visèrent à des synthèses audacieuses entre les différentes
écoles naturalistes dominantes en Europe.
Cet éclectisme forcé permettait à beaucoup de naturalistes italiens d'accepter
en grande partie des idées de Cuvier ou d'autres critiques du transformisme
lamarckien, et de leurs mises à jour successives, en même temps que d'accueillir
les suggestions évolutionnistes de Lamarck, Etienne Geoffroy Saint-Hilaire et
Bory de Saint-Vincent. Si, pour Cuvier, les thèses de Lamarck étaient le fruit
d'une imagination débridée, et si, pour Lamarck, les recherches de Cuvier
souffraient d'un culte du détail, pour beaucoup de naturalistes italiens Cuvier
et Lamarck étaient les représentants les plus importants du Museum d'Histoire
naturelle de Paris ; et leurs œuvres étaient lues et méditées avec l’attention
qui leur était due. L'examen des œuvres et des rares
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