Comme chez Lamarck, la « tendance au développement » ne présentait pas de
connotations de type vitaliste ou animiste. La « tendance » était déduite a
posteriori de l'observation du « fait » de l'échelle graduée des êtres vivants
:
« De l'existence de cette chaîne, on tire les preuves directes de la tendance de
la nature à se développer et à perfectionner l'organisation ; et de l'existence
des branches latérales celles de sa tendance à se mettre en rapport avec les
circonstances environnantes et influentes » (5).
Chez chaque animal, les « germes » démontraient la tendance à se développer dans
les différentes phases de la croissance embryonnaire et individuelle ; de même
les premiers « germes » créés par génération spontanée compliquaient
progressivement l'organisation, se « perfectionnaient », bien que ce fût avec
une lenteur extrême, au cours de périodes si longues qu'elles échappent à
l'observation humaine.
Bonelli avait repris également plusieurs thèmes de la géologie lamarckienne,
comme par exemple le refus de s'engager dans une « Théorie de la Terre » de type
Buffon ou Delamétherie. L'étude du passé devait être fondée sur l'examen du «
globe tel qu'il est aujourd'hui par rapport à sa composition », sans recourir à
l'hypothèse d'un état de choses originel caractérisé par des phénomènes
physiques et chimiques différents de ceux que l'on peut observer dans le monde
actuel. L'entomologiste turinois, en outre, n'hésitait pas à accepter pleinement
les conséquences anthropologiques des théories lamarckiennes. Dans ses
manuscrits, et dans ses leçons, Bonelli se déclarait convaincu que « l'homme
s'est aussi formé à la manière des animaux et des plantes », et... « qu'il a
reçu le degré d'intelligence, de supériorité, etc., dont il est doué par le
concours heureux d'un grand nombre de circonstances ». Entre les facultés
intellectuelles et morales de l'homme et celles des autres animaux dotés d'un
système nerveux, n'existait donc pas un hiatus, mais une simple différence de
degré (6).
Toutefois, par de nombreux aspects, la doctrine évolutionniste de Bonelli se
distinguait nettement et explicitement de celle qui fut proposée par Lamarck. Au
cours des années 1812-1813, l'entomologiste avait élaboré une théorie complexe
sur la formation d'une pluralité de « germes » ou « molécules organiques »
différenciées par leurs structures, qui donnaient naissance à différents types
d'organisation animale (7). Dans la Philosophie Zoologique, Lamarck lui-même
avait fait allusion à la possibilité de repérer au commencement même de
certaines branches (...) des « générations directes », mais c'est seulement dans
le « Supplément » du
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