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Documents sur les auditeurs de LamarckP.Corsi, Julien-Joseph Virey, the first critic of Lamarck (in french)
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Cuvier lui-même, qui ne s'est pourtant pas toujours montré très enclin à 
reconnaître ses dettes envers ses prédécesseurs, ni d'ailleurs envers ses 
contemporains, attribue à Virey le mérite d'un important apport au Règne Animal, 
à savoir l'idée que le système nerveux représente le caractère taxinomique le 
plus fiable et le plus pratique. Comme Virey l'établit en 1803, le système 
nerveux, où la présence de cellules nerveuses joue le rôle d'un véritable « 
zoonomètre » permettant de procéder à une classification naturelle du règne 
animal dans son entier (5).
 

Il faut mentionner brièvement une autre caractéristique des travaux de Virey. 
Lecteur insatiable, professant son éclectisme, il se montrait soucieux 
d'intégrer à ses thèses toute idée ou théorie nouvelle qu'il trouvait fortement 
significative de son époque. A ce que je sache, il fut l'un des premiers 
naturalistes français à appliquer la loi de Malthus à la thèse traditionnelle 
sur « l'équilibre de la nature », puis à l'étendre à l'interprétation 
d'événements politiques :
 

« Il y a donc un rapport nécessaire entre le nombre des hommes et la quantité 
des substances organiques qui fournissent à la nourriture et à leurs besoins, 
rapport qui, venant à se déranger, entraîne à sa suite des famines... des 
convulsions politiques, des guerres... La politique n'est qu'un instrument de la 
nature, sans que nous nous en doutions, les vicissitudes des nations ne 
dépendent pas uniquement des hommes » (6).
 

Du corpus des travaux de Virey, deux groupes d'écrits nous concernent dans cette 
étude. Ce sont les articles et livres qu'il publia de 1797 à 1800, année de 
parution de l'Histoire Naturelle du Genre Humain, et ses contributions au 
Nouveau Dictionnaire d'Histoire Naturelle des années 1803-1804. Le premier 
groupe d'écrits nous autorisera à établir ce que furent les idées initiales de 
Virey sur les espèces et leurs modifications potentielles. Les notes et 
additions qu'il fit à l'édition de l'œuvre de Buffon par Sonnini de Manoncourt 
nécessitent une mention particulière. En effet, ce travail fournit d'importantes 
informations sur le climat politique et intellectuel parisien de la fin du 
XVIIIe siècle. Sonnini, comme on le sait, fut l'élève et le collaborateur de 
Buffon. Ruiné par la révolution, il usa de sa remarquable habileté dans les 
affaires à l'encontre des nouveaux venus qui occupaient les chaires du Muséum, 
et qu'il haïssait, contre Cuvier en particulier. Note après note, chapitre après 
chapitre, Sonnini se moque de ces nouveaux maîtres de l'histoire naturelle, ces 
« hommes nouveaux » qui prennent la liberté de s'asseoir aux côtés des 
nomenclateurs et avilissent le nom du grand Buffon. 

(5) G. CUVIER, Le Règne animal distribué d'après son organisation, 4 vol., 
Déterville, Paris, 1817, vol. 1, p. xxi.
 

(6) J.J. VIREY, Histoire naturelle du genre humain, 3 vol., Crochard, Paris, 
1824, vol. 1, p. 15. 

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