que les lumières sont plus nuisibles qu’utiles à l’homme, tandis que ce ne sont
réellement que l’erreur et le faux-savoir qui lui nuisent.
Un homme célèbre, prenant en considération les maux nombreux qui affligent
l’humanité s’est persuadé que le bonheur ne pouvait se rencontrer que dans un
état très-borné de l’intelligence, et que le savoir était plus nuisible qu’utile
à l’homme. Le sens absolu de cette opinion est, selon moi, une erreur évidente,
quoique jusqu’à un certain point l’apparence lui soit favorable.
C’est assurément l’ignorance qui est la première et la principale source de la
plupart de nos maux, depuis surtout que nous vivons en société ; c’est aussi
l’extrême inégalité d’intelligence, de rectitude de jugement et de connaissances
acquises qui s’observe entre les individus d’une population quelconque, qui
concourt sans cesse à la production de ces maux. Ce n’est en effet que
relativement que certaines vérités peuvent paraître dangereuses ; car elles ne
le sont point par elles-mêmes ; elles nuisent seulement à ceux qui sont en
situation de se faire un profit de leur ignorance.
Ainsi, quant à l’opinion qui considère les lu-mières comme plus nuisibles
qu’utiles à l’homme,
|