sur le registre des élèves de son prédécesseur là où Landrieu l'avait
abandonnée. Comme cela avait déjà été le cas pour Landrieu, pour Vachon aussi
reconnaître le rôle de Lamarck professeur devait contribuer à démontrer que, en
dépit de son isolement, il avait quand même eu la chance de parler et
d'enseigner à plus de 1.100 élèves dans une période de 26 ans : "Peut-on douter
de l'influence de Lamarck sur la jeunesse en constatant que parmi les 234
auditeurs ayant mentionné leur âge, 155 (soit 66%) avaient moins de vingt-cinq
ans et 42 (soit 18%) de vingt-cinq ans à trente ans ; le nombre d'élèves ayant
moins de trente ans (197) représentant donc 84% de l'auditoire ! Peut-on encore
en douter au relevé des professions : 42 auditeurs étaient des médecins ou
chirurgiens mais ils étaient accompagnés de 37 étudiants en médecine, de 17
élèves pharmaciens et de 7 naturalistes élèves-voyageurs" (6).
En ce qui concerne l'évaluation qualitative du registre, Vachon s'en tint aux
résultats de Landrieu, et dans ses écrits consacrés au sujet, il reprit en effet
les exemples des auditeurs célèbres ainsi que les considérations critiques du
biographe de Lamarck.
Après la mort de Max Vachon, les résultats de son travail et de celui de Georges
Rousseau (ainsi que le manuscrit du registre) restèrent confiés à des boîtes en
carton ; grâce à l'amicale courtoisie de M. Yves Laissus et de Mme Ducreux,
Conservateur de la Bibliothèque centrale du Muséum, qui a mis à ma disposition
les boîtes Vachon, il est maintenant possible de reprendre encore une fois les
recherches. Toutefois, il s'agira d'un travail dont les finalités et les
méthodologies ne peuvent faire abstraction du changement de climat
historiographique intervenu dans les études sur Lamarck et dans l'histoire de la
biologie du dix-neuvième siècle en général.
Il est bien connu que dans les années 1970 on a assisté à un renouveau d'intérêt
concernant les théories évolutionnistes : si celles de Darwin ont occupé le
premier plan, l'oeuvre de Lamarck n'a toutefois pas été négligée (7). En
France, comme en Italie, en Angleterre et aux États Unis, on a assisté à un
remarquable changement de priorités dans les études sur Lamarck : l'abandon
progressif (mais pas encore complet) des certitudes mythiques des laudateurs de
Lamarck a ouvert un espace considérable à la recherche historique, à l'examen
systématique du
(6) M. Vachon, "Lamarck et son enseignement au Muséum", dans Histoire et Nature,
1981, 17/18, pp. 7-11, p.9.
(7) Voir, pour une synthèse encore valable des résultats achévés par la "Darwin
industry", D. Kohn, éd., The Darwinian Heritage, Princeton, Princeton University
Press, 1985. Pour les importantes additions bibliographiques à partir de 1985,
voire A. Desmond and J. Moore, Darwin, Michael Joseph, London 1991.
|