JULIEN-JOSEPH VIREY, LE PREMIER CRITIQUE DE LAMARCK
Des sujets fondamentaux, des personnages clefs de l'histoire de la pensée
biologique ont été évoqué au cours de ce colloque, lors des interventions des
nombreux collègues et amis qui y ont participé. Certains d'entre vous doivent
penser que Julien Joseph Virey ne mérite peut-être pas de siéger aux côtés
d'Aristote, Linné ou Charles Bonnet même si, comme le suggère le titre de cette
intervention, son rôle de premier critique publique des théories sur le
transformisme de Lamarck lui donne droit à quelque attention. Il est d'ailleurs
probable que le nom en lui-même, Virey, abstraction faite de ses travaux et de
ses idées, soit bien peu familier à la majorité d'entre vous ; il n'est pas
inconnu cependant de tous. En effet, plus de la moitié des experts de Virey
assistent à cette conférence : les écrits qu'ils ont consacrés à notre auteur
représentent les trois quart de la littérature existant sur le sujet (1).
Ma contribution à ce colloque abordera le concept d'espèces chez Virey, ainsi
que sa critique de Lamarck, mais je ne veux nullement restreindre l'intérêt de
ses travaux à ce seul point. En fait, mon intention est d'insister sur le rôle
fondamental des travaux de Virey pour la compréhension des débats naturalistes
qui eurent lieu au début du XIXe siècle. Ni penseur original, ni naturaliste de
premier ordre, Virey fut pourtant l'un des protagonistes de l'histoire naturelle
et de l'anthropologie française et européenne. En outre, il nous fournit un
témoignage précieux sur des événements dont nous avons connaissance à travers
des reconstitutions parfois faussées par notre tendance à accorder un trop grand
crédit aux données que des auteurs comme Cuvier ou même Lamarck voulaient
imposer.
(1) Pour une introduction à la bibliographie de J.J. Virey, voir l'essai
biographique rédigé par Alexander BERMAN, dans le Dictionary of Scientific
Biography, vol. x, 44-45. Plus récemment ont écrit sur Virey : Claude BENICHOU,
dans les Documents pour l'histoire du vocabulaire scientifique, vol. 5, 1983,
pp. 1-83 ; Giulio BARSANTI, La mappa della vita, Guida Editore, Napoli 1983,
fournit, une bibliographie des historiens de l'anthropologie qui se sont occupés
de Virey, et en particulier de son apport au débat sur l'enfant sauvage
d'Aveyron. La thèse de troisième cycle de Claude BLANCKAERT, Monogenisme et
polygenisme en France. de Buffon à Paul Broca (1749-1880), Paris 1,
Panthéon-Sorbonne, 1981, 3 vol., est très utile pour avoir une vue d'ensemble
sur les débats anthropologiques dont Virey a été l'un des protagonistes les plus
oubliés des historiens.
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