Que l'on pèse bien cette considération, et l'on sentira l'inutilité qu'il y a,
le tort même qu'on a de saisir toutes les nuances que les matières composées
peuvent offrir, soit dans leur état de combinaison, soit dans les proportions de
leurs principes, pour les présenter comme autant de matières particulières que
l'on suppose exister essentiellement dans la Nature, tandis qu'elles ne sont
réellement que le résultat des altérations que d'autres matières ont été dans le
cas de subir.
Qui peut assigner le terme de tant de nuances, et entreprendre de les saisir
toutes séparément ? Et quand même on y pourrait parvenir, quelle utilité en
résulterait-il, soit pour la science, soit pour les besoins ou pour l'avantage
de l'homme ?
Le principe qui nous apprend ce que toute matière composée peut devenir et
présenter dans tous les cas possibles, vaut mieux lui seul, à tous égards, que
toutes les connais- [connaissances]
dans leur composition, telles que le soufre, certains sels, etc. on connaît
déjà, et l’on trouvera encore des procédés pour les détruire et pour les
réformer à volonté ; mais cette faculté de l’art est bornée aux objets
particuliers d'une composition très-peu compliquée, et jamais elle ne s'étendra
aux productions immédiates ni prochaines des corps vivans.
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